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Notes sur le chagrin...

Notes sur le chagrin, de Chimamanda Ngozi Adichie : voilà un petit livre qui renferme en ses 101 pages une incroyable puissance. Puissance de l'écriture, sans fioritures, puissance des sentiments pour un père absent, mort en pleine pandémie de coronavirus, à l'âge de 88 ans. Chimamanda Ngozi Adichie raconte les réunions Zoom auxquelles son père prend d'abord part, puis celles auxquelles il ne prend plus part. Face à la mort de ce père adoré, elle assume pleinement son déni : elle n'a pas envie d'ouvrir les lettres de condoléances qui disent trop une vérité qu'elle refuse. De même qu'elle n'a aucune envie d'accomplir les gestes qui viendraient entériner ce qu'elle ne peut accepter : la mort de son père. Elle se demande ce qu'elle pourrait faire pour « déproduire » cet événement qui a marqué son existence d'une pierre noire.

Notes sur le chagrin est un livre grave, mais qui fait du bien quand on est soi-même endeuillé. Il nous montre qu'on n'est pas seul. Il dit le néant auquel tout décès nous confronte, ainsi que l'effroi, la douleur et cette étrange hébétude qui, de longs mois durant, amène à fonctionner plus qu'à vivre réellement.

Parallèlement à cette lecture, j'ai écouté toute cette semaine le dernier album d'Emily Loizeau. Une pure merveille, comme toujours ! Un joyau très ancré dans l'actualité. Sachant cela, s'étonnera-t-on qu'il se trimbale une forte charge mélancolique ? Même pas peur en ce qui me concerne : un certain Hubert-Félix Thiéfaine est passé par là ! La mélancolie, il la connaît tellement bien qu'il s'en est fait, comme d'autres avec la solitude, « presque une amie, une douce habitude ». La preuve : il a raccourci son nom, la réduisant parfois d'une syllabe, pour l'appeler « mélanco ». Comme on donnerait un surnom affectueux à qui nous accompagne depuis des lustres. Bref, revenons à l'album d'Emily Loizeau. La première chanson est, selon moi, la plus belle de l'ensemble. Elle est intitulée Le poids de l'existence et évoque le drame du Bataclan. Une strophe, en particulier, m'interpelle : « C'est alors que les ombres ont ajouté à nos êtres cette part du Monde qui au fond nous avait échappé ». Strophe que je relie au deuil, ce qui me ramène au livre de Chimamanda Ngozi Adichie. Perdre un être cher, n'est-ce pas ajouter en son cœur tout le tragique du monde, tout le poids de l'existence ?

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