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  • Souvenirs d'enfance de Marcel PAGNOL

    J'ai relu dernièrement les Souvenirs d'enfance de Marcel Pagnol, ceux qui m'avaient tant fait vibrer quand j'étais adolescente et dont j'avais fini, au fil des années, par oublier l'ordre, faute de fréquentation assidue avec eux. Il était grand temps de réparer cette négligence ! Un soir de début février, je cherchais, dans ma bibliothèque, le prochain livre à lire. Et je retombai sur les Pagnol tant aimés. Je lus quelques pages de La gloire de mon père, puis quelques pages en firent soudain soixante, l'air de rien. Je fus de nouveau happée par ce récit, comme je l'avais été à l'adolescence. Très vite, les retrouvailles quotidiennes avec Pagnol devinrent le moment que j'attendais entre tous. « Vivement que la journée de boulot s'achève, que je puisse retrouver mon livre ! », pensais-je tous les matins. C'était mon rendez-vous journalier, presque clandestin, avec les senteurs provençales et les souvenirs de Marcel ! À peine avais-je fini un de ces livres que je me précipitais sur le suivant, assoiffée, éblouie, impatiente ! Et comme ça durant presque tout le mois de février, jusqu'au dernier récit, Le temps des amours. Je redécouvris avec joie la limpidité inimitable du style de Pagnol. Pas un mot de trop, pas un seul de travers, pas un plus haut que l'autre. Tout semble tracé au cordeau avec un naturel de haute volée. Les analyses psychologiques sont esquissées presque en passant, comme si de rien n'était, mais elles sont bel et bien là, profondes et parfois déchirantes. Des personnages hauts en couleur viennent à notre rencontre, et d'abord les parents du petit Marcel, et Marcel lui-même. Il y a aussi l'oncle Jules, Lili, Isabelle, Clémentine, Lagneau un peu plus tard, monsieur Sylvain, certains enseignants. La plume de Pagnol leur rend vie et voix. C'est quelque chose qui me bouleverse toujours en littérature, cette espèce de transhumance des morts qui reviennent sur des lieux qu'ils ont désertés depuis bien longtemps. On les imagine ici et là, on les accompagne alors qu'ils ne sont plus. Ils finissent par nous accompagner à leur tour. Une fois refermé Le temps des amours, je me suis sentie orpheline, un peu perdue. Durant tout le temps qu'a duré ma lecture, plus précisément ma relecture, quelque chose me portait. Et je me revoyais, adolescente, lisant avec la même avidité qu'aujourd'hui cette splendide tétralogie. Je trouve qu'il est formidable de la relire trente ans plus tard. L'expérience de ce que Pagnol appelait « la vie des hommes » (« quelques joies, très vite effacées par d'inoubliables chagrins ») confère à cette relecture une gravité qui était absente autrefois. Les impressions s'entremêlent et s'entrechoquent, on se retrouve plongé dans un passé qui n'est plus, celui de Pagnol, mais aussi le sien, unique bien qu'ordinaire. Comme c'est étrange de se sentir à la fois adolescent et tellement adulte, trop adulte déjà !