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  • La définition du bonheur, de Catherine Cusset

    J'ai découvert Catherine Cusset il y a dix-huit ans, avec La haine de la famille. Je me souviens de superbes moments de lecture durant un été caniculaire. Chaque matin, le livre m'appelait et je passais de longues heures en sa compagnie. Depuis, je guette chaque parution de cette auteure. J'aime la subtilité avec laquelle elle explore les relations humaines, les hasards dont tout mène à penser qu'ils n'en sont pas, le deuil, la féminité, l'effondrement. C'est une écriture au scalpel, qui va au fond des choses.

    La définition du bonheur, qui vient tout juste de paraître chez Gallimard, me semble être un des événements de cette rentrée littéraire. D'ailleurs, soit dit en passant, celle-ci promet d'être riche. J'ai envie de tout lire, ou presque ! Surtout les livres qui évoquent la figure paternelle, notamment celui d'Amélie Nothomb et celui de Jean-Baptiste Del Amo. Encore des dépenses inconsidérées en perspective, et pas seulement : il va falloir inventer de nouveaux rayonnages à mes bibliothèques qui craquent de partout ! Lors de mon dernier déménagement, qui remonte à presque dix ans, j'avais en ma possession 800 livres. Qu'en est-il aujourd'hui ? Je n'en sais rien. Une chose est sûre : la croissance a été exponentielle. Bref...

    Venons-en au dernier Catherine Cusset. Du moment où j'ai ouvert ce roman, je ne l'ai presque pas lâché. Très vite, on est absorbé par les deux histoires qui sont décrites ici. Celle de Clarisse et celle d'Ève. On les rencontre à l'adolescence, on les quittera à la maturité.

    Clarisse est de ces êtres qui consomment la vie à grands traits et que la vie, par ricochet, consume. Elle ne s'interdit aucune expérience, aucune folie. Une faille va cependant venir balafrer son destin. Peut-être même que cette faille sera celle qui entraînera toutes les autres dans le grand gouffre qu'elle a ouvert. Ève, quant à elle, mène une vie plus rangée. Ce qui n'exclut pas, cependant, les petits pas de côté qui amènent un léger désordre dans l'édifice apparemment inébranlable.

    Les deux trajectoires nous sont présentées par fragments qui se succèdent. À peine a-t-on quitté Clarisse que l'on retrouve Ève, tout en étant pressé de retrouver Clarisse. Même chose lorsque l'on quitte Ève. Ce qui rend la lecture totalement addictive, nécessaire, voire précipitée !

    Ce grand roman pose d'innombrables questions : que cache le vernis social de toute vie ? La surface est une chose, mais qu'en est-il des profondeurs ? À quel moment quelque chose se brise irrémédiablement dans un destin et pourquoi, et comment ? Que peuvent les autres pour nous quand on ne peut rien pour soi-même ?

    Une fois encore, l'écriture de Catherine Cusset avance à pas feutrés, instillant progressivement des ambiances, dévoilant des déchirures, des points de non-retour. On ressort un peu groggy de ce livre. Avec, également, le sentiment si souvent éprouvé par Clarisse : celui de l'abandon. On se sent orphelin. À cela, un seul remède peut-être : un autre roman de Catherine Cusset ! Tiens, si je relisais Un brillant avenir ou L'autre qu'on adorait ?!